En suivant le cacatoès

Notre quotidien est tellement semblable à lui-même d’un jour à l’autre qu’il n’y a rien de bien palpitant à raconter : je supporte tant bien que mal le changement d’heure, Paul jardine. Il est passé à l’heure d’été comme une lettre à la poste, moi pas. Nous voilà de nouveau confinés, pourtant il faudrait que je revois mon père, trop isolé.
Our day-to-day life is so similar to itself from day to day that there is nothing very exciting to say: the clocks are changing again and I bear it as best I can, Paul is gardening. He switched to daylight saving time easily, I didn’t. Here we are again confined, yet I would have to see my father again, too isolated.

Paul a planté des kiwaï il y a quelques années, ils n’ont encore rien donné mais ils courent et ils courent (les tiges peuvent dépasser quinze mètres de long !). Laurent a complété le grillage posé par Paul, en ajoutant une structure en métal en forme de dôme et une deuxième rangée de piquets pour leur donner de l’espace. Et faire aussi pousser de nouveaux plants.
Paul planted kiwai a few years ago, they haven’t given anything yet but they run and they run (the stems can be over fifteen meters long!). Laurent completed the wire mesh set by Paul, adding a dome-shaped metal structure and a second row of stakes to give them space. And also grow new plants.

Moins connu que le kiwi, le kiwaï (actinidia arguta) fait partie de la famille des actinidia, j’ai piqué sur Wikipédia la photo comparant la taille du kiwi (le plus gros) et du kiwaï.
Less well known than the kiwi, the kiwai (actinidia arguta) is part of the actinidia family, I took a photo on Wikipedia comparing the size of the kiwi (the largest) and the kiwai.

Séb a fait plusieurs séances de bûcheron avec Claude, nous voilà avec un beau tas de bois pour l’hiver prochain.
Séb did several lumberjack sessions with Claude, here we are with a nice pile of wood for next winter.

Je lis beaucoup, je vais vous en dire plus sur « L’appel du cacatoès noir » de John Danalis, un ouvrage remarquable dont je vous ai donné le titre il y a quelques temps. Paul et moi en avons parlé sur Babélio, je reprends presque intégralement le texte que nous avons rédigé.
I read a lot, I will tell you more about « Riding The Black Cockatoo » by John Danalis, a remarkable book which I gave you the title some time ago. Paul and I spoke about it on Babélio, I take almost the entire text that we wrote.

Blanc, Australien, l’auteur a fort peu côtoyé les Aborigènes pendant une quarantaine d’années sans connaître à leur sujet autre chose que des clichés. C’est presque par hasard, ce hasard auquel il ne croira plus, à force, qu’il décide de restituer aux siens un crâne que son collectionneur de père avait exposé dans le salon familial et que John a toujours connu.
White, Australian, the author had little contact with the Aborigines for forty years without knowing anything about them other than stereotype. It is almost by chance, this chance that he will no longer believe, by force, that he decides to return to his family a skull that his collector father had exhibited in the family living room and that John has always known.

Avant la prise de conscience que va faire John Danalis, la présence du crâne exposé chez ses parents le laissait indifférent.
Before the realization that John Danalis is going to make, the presence of the exposed skull in his parents left him indifferent.

Cette restitution du crâne, l’imposante cérémonie qu’elle va générer, de nouvelles amitiés avec les Aborigènes vont modifier en profondeur l’existence de John. Il prend conscience de la richesse de leur culture et se met à l’étudier avec passion.
This restitution of the skull, the imposing ceremony it will generate, new friendships with the Aborigines will profoundly change John’s existence. He realizes the richness of their culture and begins to study it with passion.

Cela change sa vision du monde.
It changes his view of the world.

À titre de comparaison, il nous suggère de définir ce qu’est l’Europe en quelques paragraphes : mission impossible, le sujet est trop riche et complexe. La culture aborigène est tout autant riche et complexe, et elle permet [p 215] « de cohabiter simultanément dans les monde rationnel et spirituel. »
By way of comparison, he suggests that we define what Europe is in a few paragraphs: mission impossible, the subject is too rich and complex. Aboriginal culture is just as rich and complex, and it allows to coexist simultaneously in the rational and spiritual world.

Ce beau récit autobiographique se lit comme un roman, bien écrit, bien structuré, à l’issue duquel on n’est plus la même personne : ce qui est vrai pour John Danalis, au terme d’une véritable quête initiatique, peut le devenir pour vous ou moi.
You read this beautiful autobiographical story like a novel, well written, well structured, at the end of which we are no longer the same person: what is true for John Danalis, at the end of a real initiatory quest, can become so, for you or me.

Pour moi, ce livre est bien plus qu’une occasion de se distraire, ou même de se cultiver. C’est un ouvrage d’une grande importance, il pousse à une prise de conscience et il doit nous ouvrir l’esprit, suivant en cela la démarche de John Danalis. Tous les lecteurs de ce livre ne vont pas nécessairement émigrer en Australie, ni même étudier à fond la culture aborigène, mais peut-être allons-nous manifester plus d’attention bienveillante à l’égard de l’Autre, l’étranger, l’inconnu.
For me, this book is more than a chance to have fun, or even to cultivate myself. It is a work of great importance, it raises awareness and it should open our minds, following the approach of John Danalis. Not all readers of this book will necessarily emigrate to Australia, or even study Aboriginal culture in depth, but perhaps we will show more benevolent attention to the Other, the stranger, the unknown.

Car nous avons tant à apprendre des Aborigènes. Mais, au contraire, les Européens, imbus de leur soi-disant supériorité, n’ont pas cherché à connaître les « sauvages » quand ils ont exploré l’Australie ; ils ont décidé que leur niveau d’intelligence était fort bas, que le leur était largement supérieur. Aussi valait-il mieux élever les enfants aborigènes en les coupant de leur milieu d’origine.
Because we have so much to learn from the Aborigines. But, on the contrary, the Europeans, imbued with their so-called superiority, did not seek to know the « savages » when they explored Australia; they decided that their intelligence level was very low, that theirs was much higher. So it was better to bring up Aboriginal children by cutting them off from their background.

En janvier 2020, j’avais parlé du vol légal d’enfants pratiqué dans d’innombrables pays : Groënland, Canada, l’Espagne de Franco ou le Chili de Pinochet, Guatemala, Suisse, Angleterre, et bien sûr France et Australie. Ce ne serait pas surprenant de découvrir que cette pratique existe encore ici ou là.
In January 2020, I spoke about the legal theft of children practiced in countless countries: Greenland, Canada, Franco’s Spain or Pinochet’s Chile, Guatemala, Switzerland, England, and of course France and Australia. It would not be surprising to find that this practice still exists here and there.

Pour John Danalis, le fait d’enlever de force les enfants aborigènes à leur famille est un [p118] « génocide culturel et spirituel. »
For John Danalis, forcibly removing Aboriginal children from their families is a cultural and spiritual genocide.

La suffisance, l’arrogance du Blanc, John ne manque pas de la rencontrer. Alors que les Aborigènes occupent un lieu sacré qu’on veut leur confisquer, une chaîne de télévision privée s’installe en espérant avoir du « bien saignant » à filmer. Les militants gardent difficilement leur sang-froid alors qu’on les couvre d’insultes et de moqueries afin de filmer une séquence sensationnelle.
The complacency, the arrogance of the White, John does not fail to meet it. As the Aborigines occupy a sacred place that they want to confiscate, a private television station sets up, hoping to have « bleeding good » to film. The activists find it difficult to keep their cool as they are showered with insults and mockery in order to film a sensational sequence.

L’auteur compare le comportement de ses nouveaux amis et celui des citadins stressés dont l’existence se poursuit entre nourriture industrielle, embouteillages, course permanente contre la montre. Avec humour et second degré, il reconnaît lui-même combien il a été surpris à tel ou tel moment par les Aborigènes : non, ils ne vivent pas dans des taudis, non ils ne mangent pas des larves d’insectes…
The author compares the behavior of his new friends with that of stressed city dwellers whose existence continues between junk food, traffic jams, and a constant race against time. With humor and second degree, he himself recognizes how much he has been surprised at such and such a moment by the Aborigines: no, they do not live in slums, no they do not eat insect larvae …

 

J’éprouve moins d’enthousiasme pour « Wanda », le récit fort conventionnel de Madeleine Mansiet-Berthaud : Wanda est une muda muda, une métisse. Ce long roman, une fiction, est extrêmement documenté, assez réaliste. Une partie se passe en France alors que c’est surtout le personnage de Wanda qui m’intéresse.
I am less enthusiastic about « Wanda », the very conventional story of Madeleine Mansiet-Berthaud: Wanda is a muda muda, a mixed race. This long novel, a fiction, is extremely documented, quite realistic. Part of it takes place in France when it is mainly the character of Wanda that interests me.

L’auteur de Wanda ayant publié les ouvrages de référence qui lui ont été utiles, je vous les signale à mon tour, si le sujet vous intéresse, mais je ne connais pas ces ouvrages :
Since the author of Wanda has published the reference books that have been useful to her, I point them out to you in turn, if the subject interests you, but I am not familiar with these books:
– « le chemin de la liberté » de Doris Pilkington (éditions Autrement) livre à l’origine d’un docu-fiction au même titre, de Phillip Noyce.
– « En terre aborigène » de François Giner aux éditions Albin Michel
– « Message des hommes vrais au monde mutant » de Marlo Morgan aux éditions Albin Michel
– « Australian lady » de Barbara Wood, aux éditions Presses de la Cité
Internet a changé ma façon de lire : maintenant je pose souvent mon livre pour faire une recherche sur ceci ou cela, sur celui-ci ou celui-là. C’est pourquoi je peux vous proposer ces photos de Gary Murray, cet aîné du groupe des Wamba Wamba, vêtu de la fameuse cape en peau d’oppossum largement décrite par John.
The Internet has changed the way I read: now I often put my book down to do research on this or that, this one or that one. That’s why I can bring you these photos of Gary Murray, the elder of the Wamba Wamba group, wearing the famous opossum-hide cloak widely described by John.

Les anglophones peuvent lire ici le récit que cette photo accompagne. Une publication de novembre 2018
English speakers can read the story that this photo accompanies here. A November 2018 publication

 


Cette photo accompagne une interview de Gary Murray d’octobre 2005.
This photo accompanies an interview with Gary Murray from October 2005.

Voici le portrait fait par Craig Ruddy de David Gulpili, chanteur et danseur : ce portrait a tenu compagnie à John, figurant en bonne place dans la chambre d’ami lors de son séjour à Melbourne.
Here is Craig Ruddy’s portrait of singer and dancer David Gulpili: this portrait kept John company, featured prominently in the guest room while in Melbourne.

 

John a cessé de croire au hasard et il le précise tout au long de son texte. Je ne sais pas s’il faut croire au hasard au sujet du cheminement qui a fait tomber son livre dans ma boîte aux lettres. Hasard ou pas, je vous invite vivement à découvrir cet ouvrage et à le faire connaître autour de vous.
John has stopped believing in chance and he specifies it throughout his text. I don’t know if we are to believe in luck about the path that caused his book to fall into my mailbox. Chance or not, I strongly invite you to discover this book and make it known to those around you.

Pour aller plus loin, d’autres sites anglophones.
To go further, other English-speaking sites.

Avec un récit de la restitution et une photo de John Danalis (page 12).
With an account of the restitution and a photo by John Danalis (page 12).

Peut-être même (si j’ai bien compris) un accès libre au livre de John Danalis.
Maybe even (if I understood correctly) free access to John Danalis’ book.

 

2 réflexions sur « En suivant le cacatoès »

  1. Je viens de finir de lire le livre de John Danalis, que j’avais ajouté à ma liste de lecture suite à ton article. Je suis très touché par ce texte, par le cheminement de cet homme. J’étais déjà largement convaincu de tout ce qu’il dit, mais cela me fait du bien de le lire quand même, de voir des hommes (et je parle bien de mâles, car ce sont essentiellement les hommes blancs qui ont conquis et écrasés les autres peuples) qui se questionnent, se mettent en chemin, s’ouvrent à d’autres réalités. Très inspirant. Merci.

    • Je suis contente qu’il t’ait plu. La démarche, humble et honnête, de John Danalis, est tout à son honneur. Il lui a fallu un sacré courage pour faire l’effort d’aller vers ce que sa société lui avait caché. De quitter les préjugés qu’il ne savait pas être des préjugés.

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