Lire lire lire

Été 2008

Il a fait tellement chaud qu’on est capables maintenant de faire la différence entre + 42°C et + 33°C : quand tu ouvres la porte et que tu aspires une bonne gorgée d’air brûlant. J’ai revu mon opinion sur l’installation d’une clim’, je suis moins hostile quand la chaleur est trop forte. Mais on ne doit pas la régler trop bas, et l’utiliser en même temps qu’un ventilateur permet de réduire un peu la consommation.
It’s been so hot that we can now tell the difference between +42°C and +33°C: when you open the door and take a deep breath of hot air. I reviewed my opinion on the installation of an air conditioner, I am less hostile when the heat is too strong. But it should not be set too low, and using it at the same time as a fan can reduce consumption a little.

Avril 2009 (faute de photos en août) — April 2009 (lack of pictures in August)

Avec Paul on a décidé de s’abandonner à la léthargie, et, d’ailleurs, comment faire autrement ? La semaine dernière je vous ai raconté nos escapades, mais notre activité principale c’était lire ou « bricoler » sur nos ordinateurs. Revenus de chez mon père, on a recommencé à arroser le jardin dont Jacques et Päivi se sont gentiment occupés pendant notre absence. J’essayais de faire ma part le plus tôt possible, une fois même au lever du jour, car dès huit heures cela devenait trop pénible. Après cela, ne rien faire, ne pas se donner d’obligation, profiter de ce qui nous restait, une pièce moins chaude que l’extérieur.
Tout le monde autour de nous a détesté cette période, moi aussi. J’ai retrouvé des ressentis de l’époque des confinements contre le covid. Mais la chaleur n’a pas été une décision gouvernementale à la fois absurde, autoritaire et sans nuance.
With Paul we decided to give in to lethargy, and besides, what else could we do? Last week I told you about our escapades, but our main activity was reading or « tinkering » on our computers. Back from my father’s, we started watering the garden again, which Jacques and Päivi kindly took care of during our absence. I tried to do my part as soon as possible, even once at daybreak, because by eight o’clock it became too painful. After that, do nothing, don’t give yourself any obligation, take advantage of what we had left, a room cooler than the outside.
Everyone around us hated this period, me too. I found feelings from the time of the confinements against the covid. But the heat was not an absurd, authoritarian and unqualified government decision.

Août 2010

Pourtant elle a eu le même effet, elle a permis l’isolement des uns et des autres. Je trouve intéressant d’y réfléchir. Et la chaleur, le GIEC (parmi d’autres, innombrables) s’époumone à nous le rappeler, ce n’est pas quelque chose qui nous est tombé dessus sans qu’on sache pourquoi ni comment.
Yet it had the same effect, it allowed the isolation of each other. I find it interesting to think about. And the heat, the IPCC (among countless others) shouts out to remind us, it is not something that has fallen on us without us knowing why or how.

Gros chantier en août 2011
Major construction site in August 2011

Alors on a fermé portes et fenêtres et on a beaucoup lu…
D’où vient un livre ? Pourquoi, comment, choisit-on un livre ? Certains libraires connaissent leur boulot et proposent des sélections de qualité. Le bouche à oreille fonctionne aussi très bien. Et quand telle personne te recommande tel livre, connaissant la personne, tu sais déjà un peu quel type de livres elle te recommande : c’est précieux, non ?
So we closed doors and windows and we read a lot…
Where does a book come from? Why, how, do we choose a book? Some booksellers know their stuff and offer quality selections. Word of mouth also works very well. And when such person recommends such book to you, knowing the person, you already know a little what type of books he recommends to you: it’s precious, isn’t it?

Gros chantier aussi en août 2012
Major construction site also in August 2012

Je pourrais rédiger des pages et des pages rien qu’avec les livres suggérés par Jérôme (à qui bien entendu nous proposons aussi nos coups de cœur). Il nous a prêté « Porca miseria » de Tonino Benacquista, écrivain plus connu pour ses romans policiers !
I could write pages and pages just with the books suggested by Jérôme (to whom of course we also offer our favorites). He lent us « Porca miseria » by Tonino Benacquista, a writer best known for his crime novels!

Août 2013

Voici donc quelques mots sur cette autobiographie pleine d’humour et très sensible, une belle expérience de lectrice.
« Porca miseria », c’est ce que répète sans cesse le père de Tonino. Il a décidé de venir faire fortune en France et ce rêve ne s’est pas réalisé. Le petit Tonino a grandi entre un père alcoolique et une mère dépressive. Ce n’est pas drôle à vivre, c’est un régal à lire. L’approche de la littérature n’a pas été facile à ce futur écrivain ! Il était bloqué dès les premiers mots d’un roman. Il faut voir avec quelle pertinence (ou impertinence ?) il analyse la célèbre formule de Boileau « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément. »
Voici sa réaction :
« Je n’ai pas attendu Boileau pour comprendre, à l’école de la rue, que celui qui s’impose dans une discussion n’est pas l’homme de bonne foi mais celui qui a le verbe haut et jamais n’hésite dans son argumentaire (…). Il suffit d’un seul fâcheux (…) pour clouer le bec à tout un peuple (…). Ma famille et moi sommes de ce peuple qui prend le baratin pour de la faconde, les phrases toutes faites pour de la répartie, les poncifs pour du bon sens, les jeux de mots faciles pour des traits d’esprit et le café du commerce pour du débat public. »
Here are a few words about this humorous and very sensitive autobiography, a great experience as a reader.
« Porca miseria » is what Tonino’s father keeps repeating. He decided to come and make his fortune in France and this dream did not come true. Little Tonino grew up between an alcoholic father and a depressed mother. It’s not funny to live, it’s a treat to read. The approach to literature was not easy for this future writer! He was blocked from the first words of a novel. You have to see with what relevance (or impertinence?) he analyzes Boileau’s famous formula « What is well conceived is clearly stated and the words to say it come easily. »
Here is his reaction:
« I didn’t wait for Boileau to understand, at the school of the street, that the one who imposes himself in a discussion is not the man of good faith but the one who speaks loudly and never hesitates in his argument (…). It only takes one annoying person (…) to shut down a whole people (…). My family and I belong to that people who take spiel for eloquence, ready-made phrases for repartee, cliches for common sense, easy puns for witticisms and commercial coffee for of public debate. »

Août 2014 — Via sarda au dessus du lac d’Aiguebelette
August 2014 — Via sarda above the lake of Aiguebelette

L’auteur s’arrange pour toujours placer une recette de cuisine dans ses bouquins. Dans les spaghetti alla carbonara, il y met de la crème fraîche « pour la stupide raison que c’est ainsi qu’on la sert, en France (…). Le sacrilège ne reste pas longtemps impuni. » Dans son livre, il est pourtant questions de « racines, d’exil, de patrie, de diaspora, d’atavisme, de gênes, d’héritage, de guerre, de fascisme, de résistance au fascisme, de religion, de miracles, du Vatican, du sacré », et, comme le déplore l’auteur, la seule controverse qu’il suscite réside dans une cuillerée de crème fraîche.
The author manages to always place a cooking recipe in his books. In the spaghetti alla carbonara, he puts fresh cream « for the stupid reason that this is how it is served, in France (…). Sacrilege does not go unpunished for long». In his book, however, there are questions of « roots, exile, homeland, diaspora, atavism, genes, heritage, war, fascism, resistance to fascism, religion, miracles, of the Vatican, of the sacred, » and, as the author laments, the only controversy he arouses lies in a dollop of fresh cream.

Août 2015

Autre façon de suggérer des lectures, Jérôme nous a mis entre les mains le catalogue d’un libraire, un ouvrage très bien fait, qui donne envie de découvrir tous les titres qu’il présente : on a réussi à se contrôler un tout petit peu. Par ce catalogue, on a découvert Claudie Hunzinger, dont on a d’abord lu « La Survivance » : un couple de libraires est expulsé, j’ai d’abord craint le récit d’un drame, mais Jenny et Sils ont de la ressource (autant le dire : « La Survivance ») et ils ne se retrouvent pas à la rue. C’est un livre érudit et de contemplation, plein d’un amour infini pour les livres et aussi des deux personnages l’un pour l’autre.
Another way of suggesting readings, Jérôme gave us the catalog of a bookseller, a very well done work, which makes you want to discover all the titles it presents: we managed to control ourselves a little bit. Through this catalog, we discovered Claudie Hunzinger, of whom we first read « La Survivance »: a couple of booksellers are expelled, I first feared the story of a tragedy, but Jenny and Sils have resource (might as well say: « La Survivance ») and they don’t end up on the street. It is an erudite and contemplative book, full of an infinite love for books and also of the two characters for each other.

Août 2016

Comme pour le livre de Tonino, je vous cite des détails, ils ne sont pas le thème central de l’ouvrage, je les ai notés parce qu’ils me touchent.
Jenny raconte comment deux hommes viennent un jour livrer un kit solaire. L’un des deux voit en passant un titre du Monde évoquant le manque de professeurs, alors il raconte : il est originaire du Gabon où il enseignait le français, il aimait ça, mais en France ce n’est plus possible car il n’a pas obtenu la nationalité française. Il précise : souvent les gens appellent les gendarmes quand les livreurs sonnent à leur porte. Et Jenny de conclure : « C’était ça la triste condition de livreurs africains perdus en Europe. »
As for Tonino’s book, I quote details, they are not the central theme of the book, I noted them because they affect me.
Jenny tells how two men come one day to deliver a solar kit. One of the two sees in passing a title of Le Monde evoking the lack of teachers, so he says: he is from Gabon where he taught French, he liked it, but in France it is no longer possible because he did not obtain French nationality. He clarifies: often people call the gendarmes when the delivery men ring their doorbell. And Jenny concludes: « That was the sad condition of African delivery men lost in Europe. »

Août 2017
houblon
hop

Dans ce logis loin de tout, en pleine montagne dans les Vosges, Jenny observe chaque jour les animaux sauvages. « J’avais appris que l’entraide entre les bêtes est un facteur d’évolution plus important que la compétition » dit-elle. Je crois que Darwin lui-même en avait conscience, c’est plus facile de parler de ses travaux en oubliant l’entraide qu’il a pourtant constatée dans la nature.
In this house far from everything, in the middle of the mountains in the Vosges, Jenny observes wild animals every day. « I had learned that mutual aid between animals is a more important factor in evolution than competition, » she says. I believe that Darwin himself was aware of it, it is easier to talk about his work by forgetting the mutual aid that he nevertheless observed in nature.

Août 2018
Carmen au jardin
Carmen in the garden

Ne pas croire que la vie à La Survivance soit un long fleuve tranquille et sirupeux. L’écriture de Claudie Hunzinger est réaliste, même si ses personnages vivent des situations plutôt hors du commun.
Do not believe that life at La Survivance is a long, quiet and syrupy river. Claudie Hunzinger’s writing is realistic, even if her characters experience rather unusual situations.

Août 2019 – Morstel

Et pour ce qui est des situations hors du commun, quand Claudie raconte son existence à elle, on n’en manque pas ! « Bambois la vie verte », édité il y a cinquante ans et ré-édité cette année, est autobiographique. Avant mai 68, avant le fameux « retour à la terre » qui fut un grand mouvement des années 70 en France, Claudie et Francis Hunzinger s’installent dans les Vosges avec un troupeau de moutons en 1965. Ils ont fait ça comme toi tu dis « je boirais bien quelque chose » et sitôt dit sitôt fait. Pas de longue préparation même si Francis a appris le métier de berger à Rambouillet. Ce livre est basé sur les notes prises au jour le jour, et que Claudie a assemblées comme un vêtement d’Arlequin.
Très vite, ils décident de se lancer dans le tissage pour éviter d’élever des animaux pour leur viande. Mais en tissage, ils savent à peine distinguer le fil de chaîne du fil de trame. Ils inventent, ils découvrent, ils arpentent la montagne et apprennent à faire des teintures avec les plantes récoltées comme le lichen ou les myrtilles.
« Il ne s’agit pas de faire de la littérature mais de porter témoignage » précise « Stonehenge », Pierre Schoentjes. Et c’est bien comme ça que j’ai lu ce livre, où l’on saute d’un incident à l’autre sans enchaînement recherché.
And when it comes to unusual situations, when Claudie talks about her own life, there’s no shortage of them! « Bambois la vie verte », published fifty years ago and re-published this year, is autobiographical. Before May 68, before the famous « return to the land » which was a great movement of the 70s in France, Claudie and Francis Hunzinger settled in the Vosges with a herd of sheep in 1965. They did it like you say « I would like something to drink » and no sooner said than done. No long preparation even if Francis learned the trade of shepherd in Rambouillet. This book is based on the notes taken day by day, and which Claudie has assembled like a Harlequin garment.
Very quickly, they decide to start weaving to avoid raising animals for their meat. But in weaving, they barely know how to distinguish the warp thread from the weft thread. They invent, they discover, they survey the mountains and learn to make dyes with harvested plants such as lichen or blueberries.
« It is not a question of making literature but of bearing witness » specifies « Stonehenge », Pierre Schoentjes. And that’s how I read this book, where we jump from one incident to another without any desired sequence.

Août 2020

Claudie et Francis ont eu deux enfants, Chloé, cinéaste, Robin, documentariste : avoir grandi dans des conditions de confort très relatives, mais proches de la nature, avec des parents heureux d’avoir réalisé leurs rêves, cela a dû compter beaucoup pour eux deux.
Claudie and Francis had two children, Chloé, filmmaker, Robin, documentary filmmaker: growing up in very relative conditions of comfort, but close to nature, with parents happy to have realized their dreams, must have meant a lot to them two.

Les films documentaires de Chloé
Chloe’s documentary films
https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_liste_generique/C_21984_F

Découvrir Claudie et Chloé si vous êtes abonné à « dernières nouvelles d’Alsace »
Discover Claudie and Chloé if you are subscribed to « dernières nouvelles d’Alsace »
https://www.dna.fr/culture-loisirs/2022/07/18/familles-d-artistes-sur-les-chemins-des-hunzinger

Connaître Robin
Meet Robin
https://fr.wikipedia.org/wiki/Robin_Hunzinger

Mes lectures, c’est comme les recettes de cuisine, je ne vais pas vous parler que de ça. J’espère vous faire partager l’enthousiasme avec lequel j’ai découvert les trois titres ci-dessus. Voici d’autres titres pour lesquels je ne ferai pas de commentaire, mais dont je vous recommande très vivement la découverte.
La Course du loup de Kerstin Ekman Le parfum des poires anciennes d Ewald Arenz, Contes farouches de Neel Doff, ce dernier sans doute difficile à trouver.
My reading is like cooking recipes, I’m not going to talk to you only about that. I hope to share with you the enthusiasm with which I discovered the three titles above. Here are other titles for which I will not comment, but which I highly recommend you discover. La Course du loup (Kerstin Ekman), Le parfum des poires anciennes (Ewald Arenz), Contes farouches (Neel Doff), the latter probably hard to find.

Enfin la pluie et la fin de cette chaleur insupportable. Je pense ne pas lire autant dans les jours à venir, maintenant que nous reprenons une vie normale !
Finally the rain and the end of this unbearable heat. I don’t think I’ll be reading as much in the days to come, now that we’re back to normal life!

C’était pourtant amusant,
des photos du mois d’août au fil des années !
Mais c’était compter sans un problème non identifié
qui m’empêche d’accéder à ma photothèque.
Alors j’ai mis autre chose.

It was fun though,
pictures of August over the years!
But that was counting without an unidentified problem
that prevents me from accessing my photo library.
So I put something else.

4 réflexions sur « Lire lire lire »

    • Tu l’aurais lu à l’époque de sa (première) sortie ? Chanceuse ! Oui, c’est une autre vie, très séduisante. Ce qui m’a sans doute le plus frappée, c’est l’insouciance avec laquelle Claudie et Francis vont lancer leur élevage. Certes, elle est enseignante et il y a donc des revenus fixes, n’empêche qu’ils se sont vraiment jetés à l’eau…

  1. Oui l’échange fait partie aussi du plaisir de la lecture. C’est l’occasion de découvrir ou faire découvrir des
    Je cautionne La Course du loup de Kerstin Ekman, (le prédateur n’est pas celui qu’on pense).
    Merci pour le conseil Montée des Eaux de Pierre Lieutahghi qui au travers d’une dystopie délivre un beau message d’humanisme. une belle découverte, vraiment.👍

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