Avec de belles pensées

J’ai attrapé la vieillesse. Ce n’est pas une maladie et d’une certaine façon tout le monde souhaite l’attraper un jour, au sens où tant qu’on reste vaillant, ou même pas trop mal en point, on préfère continuer à vivre, non ?
I caught old age. It’s not a disease and in some way everyone wants to catch it one day, in the sense that as long as you stay strong, or even not too bad, you’d rather live on, right?

Les années écoulées sont un sac que l’on porte, lourd mais d’un poids confortable, lourd de tout ce qu’on a traversé, connexion au monde, au passé, au futur.
The past years are a bag that we carry, heavy but of a comfortable weight, heavy with everything we have been through, connection to the world, to the past, to the future.

J’ai attrapé la vieillesse. Oh, ça a commencé depuis longtemps puis ça s’est précisé. Faire des siestes plus longues, démarrer plus doucement, profiter du temps qui de toute façon nous dévore, rester plutôt spectateur sur la berge qu’acteur dans les remous du fleuve.
I caught old age. Oh, it started a long time ago and then it became clearer. Take longer naps, start more slowly, take advantage of the time which devours us anyway, remain more of a spectator on the bank than an actor in the eddies of the river.

Est-ce la raison pour laquelle, mardi dernier, je n’ai publié qu’un coucou rassurant, et pas mon habituelle chronique ?
Mon blog a pris de l’importance pour moi. C’est un défi, hebdomadaire le plus souvent : transformer les idées que j’ai en tête, plus ou moins vagues, parfois précises, les malaxer comme une pâte pour en faire un tout, savoir quand c’est mûr, prêt à récolter, ou quand c’est cuit, prêt à savourer. Il y a beaucoup d’intuition là-dedans et un peu de métier : si je retournais de quelques années en arrière, je noterais sans doute une évolution du style.
Is this the reason why, last Tuesday, I only published a reassuring hello, and not my usual column?
My blog has become important to me. It’s a challenge, usually weekly: to transform the ideas that I have in mind, more or less vague, sometimes precise, to knead them like a paste to make a whole, to know when it’s ripe, ready to harvest , or when cooked, ready to savor. There’s a lot of intuition there and a bit of craftsmanship: if I went back a few years, I’d probably notice an evolution in style.

Le fait de cliquer sur « publier » constitue ma première récompense, comme, j’imagine, la plupart des choses gratuites. Ensuite, deuxième récompense, la communication particulière qui se crée avec mon sympathique petit public. C’est mieux si vous commentez, bien sûr, cependant mes pages n’appellent pas nécessairement de commentaires. Je vais aussi voir les statistiques de lecture, et j’ai eu une bonne surprise : mardi dernier, alors que je ne vous avais pas envoyé le petit rappel, mon blog a connu sa fréquentation habituelle.
Clicking « publish » is my first reward, like, I imagine, most free stuff. Then, the second reward, the special communication that is created with my friendly little audience. It’s best if you comment, of course, however my pages don’t necessarily require comments. I’m also going to see the reading statistics, and I had a nice surprise: last Tuesday, when I hadn’t sent you the little reminder, my blog had its usual attendance.

Voilà une bonne motivation pour ne pas prolonger mon absence de vos écrans. Et puis, je ne voulais pas abandonner Mex comme ça. J’ai seulement évoqué la soirée avec Raphaël aux guitares et Marie au chant et au violoncelle, je ne peux pas m’en contenter : ce fut une fort belle réussite. Mex est compositeur, et il écrit des textes remarquables : est-il à l’école de Rémo Gary qui, lui, est, parmi d’autres, à l’école de Jean Richepin ? J’ai vu des centaines de personnes se lever pour une ovation méritée après l’écoute des « oiseaux de passage » de Jean Richepin. Brassens a fait connaître ce texte remarquable, mais en se limitant aux trois minutes imposées par les radios, Rémo nous offre le texte intégral d’une durée de huit minutes !
This is a good motivation not to prolong my absence from your screens. Besides, I didn’t want to abandon Mex like that. I only mentioned the evening with Raphaël on guitars and Marie on vocals and cello, I can’t be satisfied with that: it was a great success. Mex is a composer, and he writes remarkable texts: is he in the school of Rémo Gary who is in the school of Jean Richepin among others. I saw hundreds of people rise to a deserved ovation after listening to Jean Richepin’s « les oiseaux de passage ». Brassens made this remarkable text known, but by limiting to the three minutes imposed by the radios, Rémo offers us the full text lasting eight minutes!

J’insiste parce que Mex a travaillé avec Rémo, et qu’il se lance lui aussi dans des textes longs, ce n’est pas courant. Toute une existence est évoquée dans la chanson de Mex, « les pognes du père », une existence tranquille, travailleuse, modeste et digne.
I insist because Mex worked with Rémo, and he also writes long texts, it is not common. A whole existence is evoked in the song of Mex, « les pognes du père », a quiet, hardworking, modest and dignified existence.

En allant à la cascade de Luizet — Going to Luizet waterfall

Ces mains, ces pognes, elles font le portrait de l’homme tout entier qui n’apparaît pas nettement derrière ce fragment de lui-même. Ce pourrait être comme l’empreinte à l’envers de toute une vie, comme une ombre, un reflet tremblotant, image à la fois fausse et réelle. Connaissent-elles un instant de répit ? Elles n’arrêtent pas, toujours actives.
These hands, these « pognes », they paint the portrait of the whole man who does not appear clearly behind this fragment of himself. It could be like the upside-down imprint of a lifetime, like a shadow, a flickering reflection, an image both false and real. Do they know a moment of respite? They do not stop, always active.

Surbaix

Je trahis le texte en le tronquant, je n’en donne qu’un tout petit fragment. Avec le texte intégral, ma chronique aurait eu pour titre « les pognes du père », mais je trouve dommage d’enfermer dans la structure blog un texte qui demande à être dit en public, et puis je crains la lourdeur éventuelle de la traduction.
I betray the text by truncating it, I only give a very small fragment. With the full text, my column would have been titled «  les pognes du père », but I find it a shame to confine in the blog structure a text that requires to be said in public, and then I fear the possible heaviness of the translation.

Janneke

Elles contiennent des mystères
Au creux de leurs poings
Des secrets où se terrent
Blessures et chagrins
They contain mysteries
In the hollow of their fists
Secrets where lie
Hurts and sorrows

(…)

Elles n’auraient pas voulu
D’une vie paillettes
Mais elles sont goulues
De joies simples discrètes
They wouldn’t have wanted
Of a glittering life
But they are greedy
Discreet simple joys
 
Elles ont le caractère
D’où elles sont issues
Des mains les pieds sur terre
Et le cœur dessus.
They have the character
Where they come from
Hands down to earth
And the heart on it.

C’est peut-être pour donner plus de force à son texte que Mex n’a pas mis de musique dessus. C’est très chouette à écouter.
It is perhaps to give more force to his text that Mex did not put music on it. It’s very nice to listen to.

Voici un autre fragment dans lequel je ne vois pas comment traduire « s’aimer et semer » sans faire disparaître la musique des mots.
Here is another fragment in which I do not see how to translate « s’aimer et semer : to love and sow » without making the music of the words disappear.

Contaminons-nous
De respect, de joie
De rires dans la voix
De liens qu’on renoue
Let’s contaminate ourselves
With respect, with joy
Laughter in the voice
Bonds that we renew
(…)
 
Il nous faut s’armer        
De généreux gestes         
C’est ce qu’il nous reste 
S’aimer et semer
We need to arm ourselves
generous gestures
This is what we have left
love and sow

Le petit môme que personne ne voit à l’école, qui se croit transparent, qui souffre de solitude, c’est « un yaourt à l’abricot », «  ni dégeulasse ni vraiment bon ». Dans l’assistance, une collègue en avait les larmes aux yeux. Cette analogie est un trait de génie, tout à fait caractéristique du style de Mex qui s’écoute à plusieurs niveaux.
The little kid that nobody sees at school, who thinks he’s transparent, who suffers from loneliness, is « an apricot yoghurt », « neither disgusting nor really good ». In the audience, a colleague had tears in her eyes. This analogy is a stroke of genius, quite characteristic of Mex’s style, which can be heard on several levels.

Tout le concert était signé Mex, sauf une reprise de la fameuse chanson de Lluis Llach, « le pieu » :
« Composée durant la dictature du général Franco en Espagne, c’est un cri à l’unité d’action pour se libérer de l’oppression, pour atteindre la liberté. D’abord symbole de la lutte contre l’oppression franquiste en Catalogne, elle est devenue un symbole de la lutte pour la liberté. »
Cette chanson a été en effet traduite dans plusieurs langues. On peut regretter de s’éloigner de la question du franquisme, on peut apprécier que les luttes se rejoignent autour d’une chanson si forte.
The whole concert was signed Mex, except for a repeat of the famous song by Lluis Llach, « le pieu » :
« Composed during the dictatorship of General Franco in Spain, it is a cry for unity of action to free oneself from oppression, to achieve freedom. Initially a symbol of the struggle against Franco’s oppression in Catalonia, it has become a symbol of the struggle for freedom. »
This song has indeed been translated into several languages. We can regret moving away from the question of Francoism, we can appreciate that the struggles come together around such a strong song.

Vous pouvez vous faire une idée de Mex en cliquant ici, un seul petit bémol, la qualité des enregistrements : Mex affectionne les prises de vue en extérieur… et au naturel !
You can get an idea of Mex by clicking here, only one small downside, the quality of the recordings: Mex likes outdoor shots… and natural!

étang de Lemps — pond of Lemps

Quand nous lui avons parlé de ce concert, Janneke s’est organisée pour y assister. Elle disait ne pas connaître le jardinage, mais elle a appris très vite et elle doit avoir une forte intuition : elle a toujours travaillé à la perfection ! Elle a fait des travaux répétitifs un peu fastidieux : désherbage, arrosage, passage d’huile de lin ou de lasure sur les portes ou la cabane… Elle s’est montrée très autonome… et avant son départ elle nous a montré son travail, un montage vidéo fort bien fait pour raconter son séjour chez nous – Paul et moi étions tout surpris !
When we told her about this concert, Janneke made arrangements to attend. She said she didn’t know gardening, but she learned very quickly and she must have a strong intuition: she always worked perfectly! She did somewhat tedious repetitive work: weeding, watering, linseed oil or exterior wood treatments on the doors or the cabin… She was very independent… and before leaving she showed us her work, a very well done video montage to tell her stay with us – Paul and I were very surprised!

Elle est parfois partie marcher seule, mais quand c’était possible nous l’avons accompagnée pour découvrir la viarhona près du Pont-de-Groslée, notre balade à Surbaix, la cascade de Luizet… Elle a assisté à l’après-midi conte proposé par Sébastien, on a tous passé un fort agréable moment. C’était aussi l’occasion pour Séb de présenter son nouveau livre à peine arrivé de l’imprimerie.
She sometimes went walking alone, but when it was possible we accompanied her to discover the viarhona near Pont-de-Groslée, our walk in Surbaix, the Luizet waterfall… She attended the afternoon storytelling offered by Sébastien, we all had a great time. It was also an opportunity for Séb to present his new book, which had just arrived from the printers.

Invitée inattendue, cette corneille a retrouvé sa liberté.
An unexpected guest, this crow has regained its freedom.

Janneke a eu le privilège d’assister à une répétition musicale de Souffle de Brume – encore merci pour cela à Jean-Pierre, Chantal et Fred. (Fred n’apparaît malheureusement pas sur cette vidéo – en cliquant ici).
Janneke had the privilege of attending a musical rehearsal of Souffle de Brume – thanks again for that to Jean-Pierre, Chantal and Fred. (Fred unfortunately does not appear on this video – by clicking here).

Installés maintenant près d’Avignon, David et Maria nous ont fait une visite avec leurs deux fillettes et le chien.
Now living near Avignon, David and Maria paid us a visit with their two little girls and the dog.

La monnaie locale, le « tissou », commence à circuler.
The local currency, the « tissou », begins to circulate.

Voici un petit aperçu pour vous donner une idée de nos journées toujours bien remplies. Malgré la sécheresse, le jardin et le parc se portent à merveille.
Here is a small preview to give you an idea of our always busy days. Despite the drought, the garden and the park are doing wonderfully.

Paul a eu le courage de réveiller son blog (rien n’est plus difficile que recommencer après un long arrêt). Si lui publie les photos des fleurs de petits pois violets, moi je vous les montre en gousses.
Paul had the courage to wake up his blog (nothing is more difficult than starting over after a long break). If he publishes the photos of the flowers of small purple peas, I show them to you in pods.

Au moment de vous poster ces quelques lignes, je ne sais pas si je vous donne rendez-vous dans une semaine, ou deux… En attendant portez-vous bien !
At the time of posting these few lines, I don’t know if I’ll give you an appointment in a week, or two… In the meantime, be well!

Toutes les photos de cette page ont été prises lors des balades dans les environs, ou ici même.
All the photos on this page were taken during walks in the area, or here.

4 réflexions sur « Avec de belles pensées »

  1. Très beau texte, les pognes du père.
    Du coup je me suis demandé si les les célèbres (et très bonnes) « pognes de Romans » devaient leur appellation à une analogie avec de grosses mains.
    A part ça, photos superbes comme d’habitude.
    Sympa de revoir David et Maria.

    • Je peux t’envoyer le texte intégral des « pognes du père » en privé si tu le souhaites. Oui, un texte magnifique.
      Je pense que c’est plutôt la pogne (gâteau) qui a donné le terme en argot pour les mains, par analogie certainement.
      David et Maria étaient partis à deux, ils sont revenus à cinq, nous avons assisté de loin à tous ces changements si importants dans une existence. Ils ne parlaient pas français, maintenant ils le parlent avec la plus grande aisance. Et les petites et le chien sont fort sympathiques !

  2. Oui c’est important la qualité du texte dans les chansons. Cela est bien rare et Pierre Desproges le déplorait déjà de manière lapidaire en dénonçant « les époumonés faméliques de la chanson francophone tiennent leur flatulences buccales pour des licences poétiques et leur permis de glousser pour des agrégations de lettres ».

    • Les propos de Desproges sonnent juste, malheureusement. Ici, on est d’autant plus contents de recevoir des artistes qui échappent à ce jugement. Du coup, je viens d’en relire la liste, et je confirme : il existe d’excellents paroliers, mais les médias ne font pas leur boulot.

Répondre à Caly Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.