Lire après Lure

Il m’arrive d’acheter un livre parce qu’il m’éblouit, parce qu’il semble me donner des clés importantes, parce qu’il stimule ma réflexion par une analyse originale. Ce qui me capte dans une librairie, ce sont les ouvrages qui m’expliquent le monde : alors, feuilletant ci feuilletant ça, j’ai le porte-monnaie qui me démange entre sociologie, politique ou jardinage, autobiographies ou biographies, petits essais abscons ou thèses consistantes et si je laisse faire, je rapporte un lourd butin.
Sometimes I buy a book because it dazzles me, because it seems to give me important keys, because it stimulates my thinking through an original analysis. What captivates me in a bookstore are the books that explain the world to me: so, leafing through this leafing through that, my wallet is itching between sociology, politics or gardening, autobiographies or biographies, little abstruse essays or consistent theses and if I let it go, I bring back a heavy booty.

Malheureusement, il me manque souvent une formation intellectuelle pour capter le message, après tout quand j’ai commencé à étudier la philo au lycée, je n’y ai rien compris. Comme ces idéogrammes écrits avec de l’eau, l’idée exprimée s’évapore trop vite pour faire sens avec la suite. Voilà un livre auquel je n’ai pas accès. C’est décourageant, comme quand Gandalf ne réussit pas à ouvrir la porte de la Moria, faute de connaître la formule magique.
Unfortunately, I often lack an intellectual formation to capture the message, after all when I started studying philosophy in high school, I didn’t understand anything. Like these ideograms written with water, the idea expressed evaporates too quickly to make sense with what follows. This is a book I don’t have access to. It’s disheartening, like when Gandalf couldn’t open the door to Moria, because he didn’t know the magic formula.
Comment suivre un raisonnement quand la parole est touffue, quand le texte est si dense que je m’y perds ? Comment digérer ce que je lis, en faire ma propre substance ?
How do I follow a reasoning when the speech is thick, when the text is so dense that I get lost in it? How do I digest what I read, make it my own stuff?

J’ai élaboré ma propre formule magique : étrange peut-être, mais elle fonctionne. Je prends le livre à la première page, je choisis une sorte de mot-clé, et, sacrilège, je l’entoure au crayon ! Il peut s’agir d’un mot très simple, même d’une préposition, parfois une négation me suffit. Je m’installe dans la page, j’entoure quelques mots, je les relis (et ils se relient), et cette fois la page a du sens. Je peux même la réécrire à ma façon : « Si nous en étions restés au regret du “c’était mieux avant”, l’humanité en serait encore à la préhistoire. Les humains ont peur du changement, mais ceux-ci se produisent, et même de plus en plus vite. Des penseurs sans formation scientifique prédisent le pire sans tenir compte de tout ce qui s’est déjà produit par le passé, y compris les catastrophes. Ce livre propose une approche scientifique pour remettre les choses à leur place, et que l’on en arrive à une gestion raisonnable des phénomènes sociétaux. » (Je souligne quand je cite exactement l’auteur.)
I have devised my own magic formula: strange perhaps, but it works. I take the book to the first page, I choose some kind of keyword, and, sacrilege, I circle it with a pencil! It can be a very simple word, even a preposition, sometimes a negation is enough for me. I settle into the page, circle a few words, reread them (and they connect), – in French it’s a joke: je les relis (et ils se relient) – and this time the page makes sense. I can even rewrite it in my own way: « If we had remained with the regret of “it was better before”, humanity would still be in prehistory. Humans are afraid of change, but change is happening, and even faster. Thinkers without scientific training predict the worst without taking into account everything that has happened in the past, including disasters. This book offers a scientific approach to put things in their place, and to arrive at a reasonable management of societal phenomena. » (I underline when quoting the author.)

Ils travaillent pendant que je lis !
They work while I read!

Je commence à m’y retrouver. Je réussis ainsi à saisir l’introduction de « Arrêtons d’avoir peur – la science vous aide à y voir plus clair » écrit par le professeur Didier Raoult. Le personnage, très médiatisé, a peut-être un ego surdimensionné, sa réputation est très particulière, mais je trouve intéressante sa pensée, et si j’arrive à la saisir, je pourrai mettre en marche dans ma tête la machine-à-réfléchir qui ne demande que ça.
I’m starting to find myself there. I thus managed to grasp the introduction to « Arrêtons d’avoir peur – la science vous aide à y voir plus clair » « Let’s stop being afraid – science helps you see more clearly » written by Professor Didier Raoult. The character, very publicized, may have an oversized ego, his reputation is very particular, but I find his thought interesting, and if I manage to grasp it, I will be able to start the thinking-machine in my head who only asks for that.

Parenthèse sur une idée qui génère mes plus grandes inquiétudes. Quand Didier Raoult écrit « Nous n’avons pas les moyens de gérer l’avenir » je lui donne raison, mais alors… qu’en est-il de l’industrie nucléaire, comment convaincre nos descendants de gérer correctement les saloperies que nous leur laissons en héritage, les centrales et leurs tonnes de déchets toxiques ? Comment les former à cela ?
« Nous sommes à l’aube de découvertes exceptionnelles » poursuit ce scientifique. C’est pour cela qu’il croit que la science résoudra tous les problèmes : parce que c’est un chercheur avec un solide bagage et la connaissance précise des découvertes en question. Il « suffit » (ça, c’est moi qui le dis) que la science ait les moyens matériels d’avancer. Il « suffit » de ne pas porter au pouvoir des personnes à l’intelligence formatée par les banques, incapables de voir où sont les vrais problèmes. Cependant l’industrie nucléaire pourrait bien générer des problèmes insolubles, et ça, c’est encore moi qui le dis, mais je ne suis pas la seule à le penser !
Parenthesis on an idea that generates my greatest concerns. When Didier Raoult writes « We don’t have the means to manage the future » I agree with him, but then… what about the nuclear industry, how do we convince our descendants to properly manage the crap we leave them as a legacy, the power plants and their tons of toxic waste? How do you train them for this?
« We are at the dawn of exceptional discoveries » continues this scientist. This is why he believes that science will solve all problems: because he is a researcher with a solid background and precise knowledge of the discoveries in question. It is « enough » (that’s me saying) that science has the material means to advance. It is « enough » not to bring to power people with bank-trained intelligence who cannot see where the real problems are. However the nuclear industry could well generate insoluble problems, and that, it is again me who says it, but I am not the only one to think it!

De toute façon, ce livre permet un autre regard sur le monde. Il s’attaque aux idées reçues et fournit une foule d’exemples. J’apprécie toujours les idées éloignées de la « pensée unique ».
Anyway, this book allows another view of the world. He tackles common belief and provides a host of examples. I always appreciate ideas away from « one-size-fits-all thinking ».

Un autre ouvrage attend que je le lise pendant l’hiver – avez-vous remarqué que le printemps est là ?J’arrêterai d’avoir peur plus tard car il s’agit du livre « les soins naturels aux arbres » d’Éric Petiot aux éditions du Terran. Si je veux passer mon diplôme de sorcière, je ne peux plus remettre à demain ce que personne ne voudra faire à ma place après-demain : j’aimerais apprendre à fabriquer les substances qui feront du bien aux plantes du parc et du jardin. Autant suivre une formation sérieuse, et la publication d’Éric Petiot peut me le permettre. Si je l’étudie au lieu de passer mes journées sur mon blog, bien entendu…
Another book is waiting for me to read it during the winter – have you noticed that spring is here? I’ll stop being afraid later because it’s the book « natural tree care » « les soins naturels aux arbres » by Eric Petiot published by Terran. If I want to graduate as a witch, I can’t put off until tomorrow what no one will want to do for me the day after tomorrow: I’d like to learn how to make substances that will benefit the plants in the park and garden. I might as well follow a serious training, and the publication of Éric Petiot can allow me to do so. If I study it instead of spending my days on my blog, of course…

Dès les premières pages, l’historique des modes de traitement est passionnant : savez-vous que le premier cas de résistance d’insectes aux insecticides a été signalé déjà en 1914 ? Par ailleurs, des firmes comme Rhône-Poulenc n’ont pas pratiqué une autre forme de résistance face au Reich, « y compris au détriment des juifs évincés » précise l’auteur. Je savais déjà que Rhône-Poulenc, Bayer et tant d’autres s’étaient enrichis par la guerre de façon inconcevable. L’historienne Annie Lacroix-Riz n’a trouvé nulle part de trace de contrainte. La question de la résistance conclut-elle, « ne s’est jamais vraiment posée aux dirigeants de la finance et de l’industrie (…), elle était aberrante, étrangère à leurs préoccupations (…), la résistance est restée longtemps pour eux absurde et sans objet ».
From the first pages, the history of treatment methods is fascinating: did you know that the first case of insect resistance to insecticides was reported already in 1914? Moreover, firms like Rhône-Poulenc did not practice any other form of resistance against the Reich, « including to the detriment of the ousted Jews », specifies the author. I already knew that Rhône-Poulenc, Bayer and so many others had enriched themselves by the war in an inconceivable way. Historian Annie Lacroix-Riz found no trace of coercion anywhere. The question of resistance, she concludes, « never really arose for the leaders of finance and industry (…), it was aberrant, foreign to their concerns (…), the resistance remained for a long time for them absurd and pointless ».

Tu poses si tu as quelque chose à poser, tu prends ce qui t’intéresse.
You put if you have something to put, you take what interests you.

Bon, j’apprécie de trouver ces informations dans un livre technique. Il a de plus une présentation belle et efficace avec de nombreux encadrés et des bandeaux, par exemple productrice de roténone qui facilitent la lecture (tiens, c’est un peu pareil quand j’encadre un mot…!). Les illustrations sont utiles. Et j’ai mis longtemps à remarquer la petite chenille qui court sur le cadre !
Well, I appreciate finding this information in a technical book. It also has a beautiful and effective presentation with many frames and banners, for example productrice de roténone (rotenone producer) which facilitates reading (hey, it’s a bit the same when I frame a word…!). Illustrations are helpful. And it took me a long time to notice the little caterpillar running across the frame!

Mais je prends conscience seulement maintenant que quand nous parlons d’agriculture conventionnelle, il ne s’agit pas, mais alors pas du tout, des pratiques ancestrales. L’usage des produits chimiques est récent, l’agriculture conventionnelle a connu un essor fulgurant au début du vingtième siècle. Les pratiques modernes n’ont rien de traditionnel. L’agriculture biologique cherche à retrouver le savoir qui s’est perdu, et à le développer à l’aide d’analyses ou d’observations.
But I am only now realizing that when we talk about conventional agriculture, we are not talking about ancestral practices, not at all. The use of chemicals is recent, conventional agriculture experienced a dazzling rise at the beginning of the twentieth century. Modern practices are not traditional. Organic farming seeks to recover the knowledge that has been lost, and to develop it using analyzes or observations.

J’allais vous faire un cours complet sur l’agriculture mais je vois déjà Paul me faire les gros yeux, lui qui a noté la brièveté de ma page de la semaine dernière… Trop long, trop court… c’est toujours trop… Je ferai mieux de reprendre ma lecture interrompue.
Il n’y a pas vraiment de lien entre mon texte et mes photos. Vous avez pu voir celles de la dernière journée avec le broyeur, avec l’aide des habitués et des nouveaux… Un gros travail fatigant, encore une fois, mais nous étions 8 et à midi nous avions terminé ! Merci encore une fois à Lolo, Jean-Pierre et Chantal, merci à Jérôme, Yves et Karine. On a passé une belle journée avec vous tous !
I was going to give you a complete course on agriculture but I can already see Paul making big eyes at me, he who noted the brevity of my page last week… Too long, too short… it’s always too much… I better resume my interrupted reading.
There is not really a link between my text and my photos. You could see the ones from the last day with the grinder, with the help of regulars and new ones… A lot of tiring work, again, but there were 8 of us and by noon we were done! Thanks once again to Lolo, Jean-Pierre and Chantal, thanks to Jérôme, Yves and Karine. We had a great day with you all!

Vous avez pu voir aussi la rencontre à Lhuis de jardiniers, dans une ambiance vraiment sympathique. Tu poses ce que tu as apporté, tu prends ce qui t’intéresse. Il n’est même pas nécessaire de faire la moindre tractation, c’est à disposition. Nous avons écouté la chorale avec Soizic et Gauthier…
You could also see the meeting at Lhuis of gardeners, in a really friendly atmosphere. You put down what you brought, you take what interests you. It is not even necessary to make the slightest negotiation, it is available. We listened to the choir with Soizic est Gauthier…

Sous la couverture, le bébé !
Under the blanket, the baby!

…et Esther dans une formation musicale.
…and Esther in a musical formation.

Je ne serai pas là la semaine prochaine, je crois que je vous retrouve le 26 avril.
I won’t be there next week, I think I’ll meet you on April 26th.

2 réflexions sur « Lire après Lure »

  1. Bonjour Kaly,
    « Pas assez de temps » pour lire en détail mais toujours intéressé.
    Juste un mot sur Didier Raoult. Comme pour d’autres personnalités, médiatiques ou politiques, le système médiatico-politique essaye de disqualifier des personnages dérangeants en focalisant sur la personnalité. Raoult en est un exemple. Oui, il est un peu trop « m’as-tu-vu » mais…
    Une simple chose m’a éclairé sur la manoeuvre du système pour discréditer Raoult : on interdit un médicament, la chloroquine, qui a été en vente libre pendant des décennies. Un médicament donné des milliards de fois devient, par des expérimentations discutables, un dangereux poison. Certainement des intérêts financiers sont concernés par cette manipulation.

    • Entièrement d’accord !
      On focalise sur la personnalité, on s’attache au superficiel et on rejette tout ce qui vient de la personne. Même chose avec Greta Tunberg, on commente son jeune âge – et elle, pas dupe, répond qu’on ne l’écoute pas. Je crois que c’est ça, « la société du spectacle » comme la voit Debord, mais je n’ai jamais été capable de lire ce livre (voir le début de ma chronique !). Ce nivellement par le bas est très regrettable.
      Et je suis persuadée bien entendu que les intérêts financiers sont la première priorité !

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